Article original
Enquête nationale sur l’intubation difficile dans les services de réanimation françaisFrench national survey on difficult intubation in intensive care units

https://doi.org/10.1016/j.annfar.2014.03.006Get rights and content

Résumé

Objectifs

Évaluer les connaissances théoriques, l’expérience pratique des réanimateurs français ainsi que l’adhésion aux algorithmes d’intubation et de ventilation difficile de la conférence d’experts de la SFAR de 2006.

Type d’étude

Enquête nationale prospective et descriptive.

Matériel et méthodes

Un questionnaire anonyme comportant 40 questions à choix multiples a été envoyé par courrier électronique aux praticiens exerçant dans les services de réanimation français.

Résultats principaux

Cinq cent huit réanimateurs ont participé à l’enquête. Quatre-vingt-dix-sept pour cent des praticiens déclarent avoir un rangement dédié au matériel d’intubation difficile. Concernant l’expérience pratique, 421 réanimateurs (83 %) ont posé moins de 10 Fastrach™, 257 praticiens (51 %) ont réalisé moins de 10 intubations sous-fibroscopie et la cricothyroïdotomie n’a jamais été pratiquée par 269 réanimateurs (53 %) sur mannequin et par 331 (65 %) sur patient. En cas d’intubation en situation d’urgence, 29 % n’utilisent pas d’induction en séquence rapide systématique. Trois cents praticiens (59 %) utilisent la capnographie comme moyen de contrôle de la position endotrachéale. Deux cent neuf réanimateurs (42 %) jugent leur formation sur l’intubation difficile inexistante ou non adaptée et 443 (87 %) souhaiteraient participer à des simulations haute fidélité sur mannequin.

Conclusions

Les recommandations de la conférence d’experts sont insuffisamment suivies. Les techniques alternatives ne sont pas maîtrisées par tous les réanimateurs. La mise en place de formations sur l’intubation difficile, notamment à l’aide de la simulation haute fidélité pourrait améliorer les pratiques.

Abstract

Objectives

Assessing the theoretical knowledge, practical experience of French intensivists, and their compliance with French Anesthesiology and Critical Care Society's difficult airway algorithms of the expert's SFAR conference of 2006.

Study design

Prospective and descriptive national survey.

Material and methods

An anonymous questionnaire with 40 questions was emailed to physicians working in intensive care units in France.

Results

Five hundred and eight intensivists answered the survey. Ninety-seven percent of physicians reported having a portable storage unit for difficult intubation. As for practical experience, 421 physicians (83 %) have set up less than 10 laryngeal mask airway, 257 (51 %) have performed less than 10 intubations under fibroscopy and 269 (53 %) have never performed a cricothyroidotomy on mannequin, and 331 (65 %) on a patient. In case of emergency intubation, 29 % of them do not use a rapid sequence induction. Three hundred physicians (59 %) use capnography as monitoring of the endotracheal position. Two hundred and nine (42 %) consider they have not been trained to difficult intubation and 443 (87 %) would like to participate in high fidelity simulations mannequin.

Conclusions

National airway management algorithm was insufficiently followed. Alternative techniques do not seem to be mastered by all physicians. French intensivists expect more training on difficult intubation, including high fidelity simulation.

Introduction

L’intubation difficile en réanimation a une incidence supérieure à celle observée au bloc opératoire [1]. Le taux se situe entre 8 et 23 %, avec une moyenne d’environ 10 % [2], [3], [4], [5]. Cette incidence est similaire à celle retrouvée en médecine préhospitalière [6].

L’intubation trachéale en réanimation est un geste à risque élevé de complications sévères immédiates [2], [7] : elle est souvent réalisée en situation d’urgence, chez un patient estomac plein, parfois en insuffisance respiratoire aiguë et avec un statut hémodynamique précaire [8], [9], [10]. Des procédures de sécurisation de l’intubation en situation d’urgence et en réanimation [4], [11], [12] ainsi que des objectifs pédagogiques [13] ont été proposés.

Deux études récentes ont souligné le manque d’expérience de certains praticiens concernant cette gestion des voies aériennes en Angleterre, Australie et Nouvelle Zélande [14], [15]. En France, une enquête régionale en 2010 a montré que le nombre de procédures préconisées pour maîtriser une technique alternative n’était que rarement atteint en fin de cursus par des internes pourtant en DES d’anesthésie-réanimation [16].

À notre connaissance, aucune enquête nationale n’a été menée en France sur les connaissances des réanimateurs sur l’intubation difficile en réanimation. L’objectif de cette étude était d’établir un état des lieux sur les connaissances théoriques et l’expérience pratique des réanimateurs français, sur le matériel à disposition au sein des services, ainsi que sur l’adhésion aux algorithmes d’intubation et de ventilation difficile de la conférence d’experts de la SFAR de 2006.

Section snippets

Matériel et méthode

Il s’agit d’une étude prospective, multicentrique et descriptive, par questionnaire électronique anonyme. Quatre médecins investigateurs de l’étude ont contacté par téléphone 392 centres hospitaliers français avec services de réanimation (annuaire des hôpitaux en ligne consulté par région) : cette démarche a permis de récupérer les adresses mails des chefs de service, des praticiens ou des secrétariats à qui nous avons demandé de diffuser le questionnaire aux personnes concernées (médecins

Résultats

Sur les 837 courriers électroniques envoyés (726 praticiens, 47 chefs de service et 64 secrétariats), 508 questionnaires ont été recueillis (Fig. 1). Les Tableau 1, Tableau 2 présentent les données géographiques, démographiques et le mode d’exercice professionnel des praticiens ayant participé à l’enquête.

Discussion

Notre étude permet de fournir un état des lieux national sur la prise en charge de l’intubation difficile dans les services de réanimation français : absence de certains matériels recommandés pour la prise en charge de l’intubation difficile, techniques d’induction en séquence rapide ou de préoxygénation parfois inadaptées, ainsi que maîtrise insuffisante des techniques alternatives par les médecins sont les enseignements importants de ce travail.

Concernant le matériel, l’utilisation d’un

Conclusion

Ce travail constitue, à notre connaissance, la première enquête nationale française concernant la prise en charge de l’intubation difficile en réanimation. Les résultats de notre étude montrent que la formation initiale ou continue des réanimateurs français sur la gestion des voies aériennes est insuffisante.

Le respect de protocoles standardisés, qui permettent de sécuriser l’intubation en réanimation, doit être enseigné. Ces protocoles incluent notamment la recherche systématique de critères

Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

Références (29)

  • P. Gouin et al.

    Impact de la conférence d’experts intitulée « Modalités de la sédation et/ou de l’analgésie en situation extrahospitalière »

    Ann Fr Anesth Reanim

    (2008)
  • C. Johnson et al.

    Clinical competence in the performance of fiberoptic laryngoscopy and endotracheal intubation: a study of resident instruction

    J Clin Anesth

    (1989)
  • K. Kuteifan et al.

    Enquête nationale sur la pratique des « Revues de morbi-mortalité » en réanimation

    Ann Fr Anesth Reanim

    (2013)
  • S. Jaber et al.

    An intervention to decrease complications related to endotracheal intubation in the intensive care unit: a prospective, multiple-center study

    Intensive Care Med

    (2010)
  • Cited by (8)

    • Intubation in intensive care medicine: We could improve our practices!

      2014, Annales Francaises d'Anesthesie et de Reanimation
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